Politique

Bérézina de ses listes aux élections locales: Macky Sall perd un référendum

Les résultats des élections locales de dimanche dernier sont connus dans leurs grandes tendances. des élections qui ont pris la forme d’un référendum pour ou contre le président Macky Sall.

Cette donne a favorisé l’élection de beaucoup de maires qui ne sont pas connus des populations. C’est surtout valable pour les listes de Yewwi askan Wi. Un référendum où le Oui symbolisait YaW et le Non BBY de Macky Sall. Un référendum qui a vu les populations de la région de Dakar sanctionner le président de la République et ses listes.

Les électeurs disent avoir sanctionné le camp présidentiel qui faisait montre d’une « arrogance » injustifiée à leurs yeux.

Ainsi, le vote « référendaire » avec son caractère scientifique rentre dans l’histoire électorale nationale. Des votants approchés estiment que les élections locales de dimanche dernier seront déterminantes pour les législatives de juin prochain et l’élection présidentielle de 2024.

Des élections locales, donc, qui ont servi de référendum. Duquel le président Sall est sorti grand perdant dans les plus grosses localités. Cela s’est vérifié plus particulièrement avec la liste particulière de Touba où les populations ont contourné de manière intelligente les bulletins de « Benno Bokk Yaakaar » que certains considéraient comme étant ceux du Khalife général. A la place, ils ont utilisé le bulletin blanc pour signifier leur opposition à la liste dite « du Khalife ».

Des analystes politiques interpellés, parmi lesquels le Pr Ngouda Mboup et le journaliste Mamadou Thior du Cored, évoquent la nouvelle réalité politique qui s’impose au président Sall. Avec cette nouvelle approche des électeurs, Macky Sall est le grand perdant de ce « référendum ».

Pr Ngouda Mboup, constitutionnaliste: « Macky sall doit rectifier le tir et de revoir sa gouvernance publique »
Les élections locales du 23 janvier 2022 ont été décevantes pour la coalition « Benno Bokk Yaakaar » sur une bonne partie du territoire national. « Yewwi Askan Wi », mise sur pied par des membres de l’opposition radicale, s’est retrouvée avec une plus grande partie des mairies, en tout cas les plus convoitées.

D’après le constitutionnaliste Ngouda Mboup, constitutionnaliste, ces élections locales, aux allures de votes sanction, semblent être une alerte pour les prochaines législatives de juin 2022 et à l’élection présidentielle de 2024.

Selon notre interlocuteur, les Sénégalais ont sanctionné le régime en place. Elles ont envoyé un signal fort au Président de la République en lui demandant de clarifier sa position sur un certain nombre de questions. La première, fondamentale, est sa position qui devrait être sans équivoque sur le 3ème mandat. La seconde, concerne la gouvernance publique où les électeurs demandent au Président de rectifier le tir.

Eclatement du vote au profit de l’opposition
La troisième chose, relève-t-il, serait qu’il élargisse et éclaircisse les règles afin que la démocratie sénégalaise ne soit plus étouffée à travers des chroniques judiciaires et des positions partisanes qui brouillent les cartes et qui ne permettent pas aux citoyens de s’exprimer librement.

Concernant le vote sanction, Pr Ngouda Mboup estime qu’il est normal. « La coalition Benno Bokk Yaakkaar est à bout de souffle. Et cette situation a produit un vote éclaté alors que l’opposition, dont « Yewwi Askan Wi », bénéficiait d’un vote compact. Ce qui lui a permis de prendre le dessus dit il. Il s’y ajoute que beaucoup de leaders, investis par le président de la République, ont été parachutés. Alors que, dans la coalition « Yewwi Askan Wi », il y avait une compétition sous forme de primaires pour choisir les candidats. Cette formule lui a permis de rafler ce grand nombre de municipalités.

« Les populations ont envoyé un signal fort à la classe politique qui était en train de somnoler en lui disant qu’elles mettent au-dessus de tout, et notamment de l’argent et de l’arrogance du pouvoir, les valeurs et les principes. Les valeurs et les principes devant l’achat des consciences. Il y’a des dynamiques sociales fortes en marche que rien ne peut arrêter », estime le Pr Ngouda Mboup.

Transparence et redevabilite
Autre chose très déterminante dans le vote des Sénégalais de dimanche dernier, selon le constitutionnaliste, c’est le fait que la transparence et la redevabilité incombent à toute personne qui détient une parcelle d’autorité ou qui aspire à une fonction gouvernante. Les listes parallèles avec le vote-sanction étaient une stratégie à risque qui définira les règles du prochain remaniement. « Si, dans cinq mois, on organise des législatives, on sera dans une continuité, c’est l’état de grâce comme on dit et l’opposition va encore rafler et faire une razzia à l’Assemblée nationale.

Et, il y a des risques d’imposer une cohabitation au président Macky Sall à l’Assemblée nationale. Dans ce cas de figure, le Président Sall risque d’être un monarque qui règne. Mais, il ne gouverne pas en attendant l’élection présidentielle 2024 », pré- vient Ngouda Mboup.

Mamadou Thior, CORED: « Ousmane sonko a jeté un référendum sur Macky sall »
Mamadou Thior, président du Cored (Commission pour le respect des règles d’éthique et de déontologie de la presse), a insisté sur le discours du leader de Pastef, Ousmane Sonko, un des leaders de l’opposition. Le journaliste a rappelé qu’Ousmane Sonko n’a jamais cessé de dire que tous ceux qui veulent voter pour lui devaient le faire à l’occasion de ces locales. Et, les résultats à Ziguichor, montrent que les populations ont adhéré largement à son appel.

Les élections locales risquent d’être un baromètre de mesure pour les prochaines élections législatives de ce mois de juin et présidentielle de 2024. Mamadou Thior du Cored affirme qu’un des principaux opposants, Ousmane Sonko, a jeté un référendum sur le président Macky Sall.

« Partout où il est passé, il a répété qu’en direction de 2024, tous ceux qui voudraient voter pour Sonko afin qu’il soit président, doivent le faire maintenant. Un appel entendu aussi bien à Ziguinchor que dans d’autres grandes villes où des candidats de « Yewwi Askan Wi » ont défait des ténors de « Benno Bokk Yaakar ». « On peut dire que « oui », ces élections étaient bien un référendum que l’opposition a gagné contre le pouvoir », martèle Mamadou Thior du Cored.

Rappelant que le président de la République doit nommer, sous peu, un Premier ministre, l’analyste indique que « ce sera à lui de voir le profil adapté pour limiter les dégâts. Cette personnalité doit être un rassembleur pour taire les contradictions qui naissent au sein de son parti. Aujourd’hui, son éventuelle candidature pour 3ème mandat pose problème au sein de son parti. Certains veulent être candidats en 2024. Et, ils ne peuvent pas l’être », explique Mamadou Thior.

Selon lui, les résultats de dimanche dernier montrent que Macky Sall ne peut pas être candidat en 2024. « Ces problèmes de succession sont à régler en interne. Ma position a toujours été que le président Macky Sall ne posera pas sa candidature pour un troisième mandat. Alors, il doit éclairer une bonne fois pour toute la population sénégalaise de manière solennelle et nette sur cette question ».

Mamadou Thior est d’avis que le président Macky Sall a l’occasion actuellement de se concentrer sur le reste de son mandat et de préparer sa sortie par la grande porte. « Au moment où nous sommes en train de savourer ce beau visage montré par le Sénégal à travers la réussite démocratique des élections départementales et municipales, il y a un pays, le Burkina en l’occurrence, qui est en train de vivre un coup d’Etat. C’est dire que nous sommes un pays chanceux. Alors, nous devons nous en féliciter et prier le Bon Dieu que cela continue. Quand une démocratie est vitale, il n’y a aucune place pour ces coups d’Etat que nous voyons dans la sous-région », conclut-il.

Zeinab Sanghare

Jean Louis Verdier - Rédacteur en Chef Digital - Paris- Dubaï - Hong Kong dakarecho@gmail.com - Tél (+00) 33 6 17 86 36 34 + 852 6586 2047

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