Tissus colorés, imprimés traditionnels et style moderne: sur le salon Who’s Next qui a ouvert ses portes ce dimanche cinq labels nigérians apportent une proposition africaine tendance.
Ainsi WAF, Eki Kere, Elexiay, Obida et Aga Culture présenteront leurs dernières collections sous l’étendard LagosXParis. Pour chacun d’entre eux, il s’agira d’une première: participer à un salon professionnel en Europe. Mais justement ces marques ont bénéficié de la formation et l’accompagnement de l’incubateur franco-nigérian LagosXParis, pour répondre aux attentes des clients et multimarques européens.
Alors pour les cinq labels sélectionnés, quelle est la proposition?
Eki Kere mêle des imprimés graphiques et travaillés dans des couleurs vives comme des teintes plus sobres, mêlés à un élégant travail du raphia. La créatrice, Abasiekeme Ukanireh vient d’un village spécialiste du travail de cette matière et sollicite ainsi les savoir-faire locaux. Pour s’adapter à certains goûts européens, elle propose aussi certains modèles solaires sans cet ajout. Positionné sur un créneau premium, le label fondé en 2020 propose du prêt-à-porter et des accessoires entre 75 et 250 euros.
Imprimés et travail artisanal de la matière s’unissent également chez Aga Culture du designer Moyo Ogunseinde, et sa ligne ensoleillée et légère AADA. La marque joue avec un storytelling empli de références africaines et notamment à la culture Yoruba. Proposant un vestiaire fluide pour la femme et l’homme, le label se positionne avec des produits entre 45 et 220 euros.
WAF est l’ovni de cette sélection: le label créé il y a une dizaine d’années déjà dispose de deux boutiques au Nigeria et même d’un skatepark à Lagos. Car WAF se présente comme la première marque de skate venue d’Afrique de l’Ouest. Le label joue avec les codes du streetwear et revendique son esprit communautaire avec des tee-shirts, des sweatshirts, des pantalons et nombre d’accessoires avec une offre retail entre 40 et 140 euros.
Il ne s’agit d’ailleurs pas nécessairement de très jeunes pousses, le programme (porté par l’ambassade de France dans la capitale nigériane et le ministère des Affaires étrangères) visant justement à sélectionner des talents du deuxième pays le plus peuplé d’Afrique pour leur permettre de structurer leur activité. Impliquée depuis l’origine dans le projet avec sa structure Lago54, Emmanuel Courrèges, qui accompagne justement les cinq labels à Paris, présente en effet une démarche de structuration locale de ces entreprises avant même un programme à l’export.
« Nous avons sélectionné neuf labels de mode et un projet design, explique la journaliste qui a grandi et travaillé en Afrique de l’Ouest et a travaillé avec Nelly Wandji de la société Moonlook, spécialisée dans le design africain, sur ce projet d’accompagnement. Notre volonté était de fédérer autour de l’incubateur des experts sur les sujets mode et design, mais surtout des acteurs ayant une connaissance et une sensibilité des cultures africaines. Nous avons débuté par un audit approfondi, auquel a participé un cabinet de Lagos qui a sécurisé et remis à plat toute la partie légale afin que les labels soient prêts à se développer.
Nous les avons ensuite accompagné sur les aspects marketing et commerciaux, comme sur la création d’un brandbook. Et nous avons fait en sorte de leur apporter une vision régionale de l’écosystème avec des intervenants connaissant les contraintes et les marchés africains ». Ainsi les créateurs de marques ont bénéficié des éclairages de Zara Odu, spécialiste de la mode circulaire basée au Nigéria ou de Mariama Camara, entrepreneure guinéenne, qui dispose de plusieurs ateliers de production artisanaux en Afrique de l’Ouest.
C’est donc fort de cette formation débutée en 2023, que les marques ont préparé leur venue sur le salon Who’s Next du 8 au 10 septembre. « Nous avons fait le point avec chacune d’entre elle et avec Sylvie Pourrat du salon. Sur les neuf marques de mode, cinq sont présentes sur le salon Who’s Next. Mais nous avons deux marques dont l’offre n’était pas suffisamment prête pour venir. Et nous leur avons expliqué pourquoi. »
En revanche, deux autres labels déjà bien établis Tjwho et surtout le Lagos Space Programme déjà repéré par les prix LVMH ou Woolmark, seront présentés sur le salon Première Classe à la fin du mois durant la Fashion Week de Paris sur un créneau plus créatif et haut de gamme.
Pour les initiateurs de l’incubateur, dont la sélection de la seconde promotion est en cours, l’ambition est bien sûr que ces marques dénichent des clients européens, mais aussi de leur permettre de gagner en compétence pour se diffuser sur le marché de la distribution de la mode africaine en pleine structuration.
Olivier Guyot © 2024 FashionNetwork.com
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