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Alioune Tine et cie «rectifient» Ismaïla Madior Fall après ses critiques contre la Cour de Justice de la CEDEAO

Alioune Tine et cie «rectifient» Ismaïla Madior Fall après ses critiques contre la Cour de Justice de la CEDEAO

La sortie du Pr Ismaïla Madior Fall,, non moins Ministre d’Etat auprès du président de la République, contre la décision de la Cour de justice de la CEDEAO, demandant à l’Etat «de lever tous les obstacles à une libre participation aux élections…par la suppression du système de parrainage électoral», n’a pas laissé de marbre les «Droits-de-l’hommistes».

Dans une tribune intitulée “Réponse au Professeur Ismaïla Madior Fall : on peut critiquer des juges, on ne les menace pas“, Afrikajom Center, la Raddho et la Lsdh s’en sont pris au ministre d’Etat qu’ils accusent de vouloir discréditer la Cour de justice de la CEDEAO.

Pour ce faire, Alioune Tine de Africajom Center et cie, qui sont d’avis qu’on est en présence d’une entreprise de destruction de la Cour ont «démonté» l’argumentaire utilisé par Ismaïla Madior Fall, artisan majeur de la loi sur le parrainage, en citant ses «contre-vérités» et ses «erreurs d’analyse» de l’arrêt de la Cour.

Concernant tout d’abord le parallèle entre la condamnation du parrainage par la Cour et l’impossibilité totale d’une telle condamnation par les deux cours européennes qui s’occupent de droits de l’homme, Seydi Gassama ; Alioune Tine et cie trouvent que «cette mise en contraste est fausse». Parce que, poursuivent-ils, «la Cour de la CEDEAO n’a jamais, dans son arrêt, rejeté le parrainage en lui-même, mais condamné les conditions dans lesquelles cette loi était appliquée » puisqu’elle constate, sur la base de statistiques et calculs avérés que « …les exigences imposées aux candidats violent le droit de participation aux élections».

Comme deuxième contre-vérité, les «Droits de l’hommistes» estiment que contrairement aux allégations du Pr Fall, «la Cour de la CEDEAO ne se départit pas de sa jurisprudence sur la nécessité d’une violation concrète d’un droit».

Ils pensent, en fait, qu’au moment de la saisine de la Cour, «il y a donc bien des personnes dont le droit a été violé, il y a bien violation concrète d’un droit», notamment les formations politiques et les citoyens du Sénégal qui n’ont pas pu se présenter aux élections du fait de la modification de la loi électorale. Dans leur logique de démonter l’argumentaire du Ministre d’Etat, Alioune Tine et compagnie jugent que la décision de la Cour n’est pas totalement hostile au Sénégal, d’autant plus que plusieurs demandes de Me Tine de l’Union Sociale libérale (USL) ont été rejetées.

«Par exemple, la Cour a jugé qu’il n’y avait aucune violation du statut des partis politiques ; a rejeté l’argument sur le caractère discriminatoire la loi électorale; et a rejeté l’argument sur l’entrave à la libre participation aux élections», listent-ils comme points sur lesquels la Cour a pris fait et cause pour le Sénégal.

LES ERREURS D’ANALYSE DU MINISTRE CONSEILLER
Ne s’en limitant pas là, Tine et cie s’en sont pris aux «erreurs d’analyse» du constitutionnaliste. Tout d’abord, ils restent convaincus que «la Cour ne se comporte absolument pas en juge de la légalité nationale, contrairement à ce qui est affirmé». Pour preuve, ils rappellent que, dans l’arrêt, l’instance sous régionale avait expressément dit qu’elle «n’est pas juge de la légalité nationale en général et de la légalité constitutionnelle en particulier».

Ils trouvent, tout de même, que rien ne l’empêche de se prononcer sur la conformité d’une règle nationale, même constitutionnelle, avec un engagement international de l’État. Dans le cas d’espèce, ils estiment que la Cour s’est appuyée, non pas sur «une règle nationale en fonction de laquelle on juge l’agissement de l’État», mais plutôt sur «un acte international, un traité en l’occurrence pas un acte national».

Poursuivant, les «Droits de l’hommistes» se portent à faux contre l’argument selon laquelle la Cour a versé dans l’opportunité au lieu de rester dans la légalité. A leur avis, la Cour a analysé une situation et en a conclu qu’un droit, conféré par des instruments internationaux, a été violé. Par conséquent, ils retiennent que «nous sommes bien dans la légalité et non dans l’opportunité». Mieux, Tine, Seydi Gassama et cie sont d’avis que le Pr Fall «confond “jugement d’opportunité“ et “jugement de valeur“», non sans le renvoyer à ses copies.

«Un jugement d’opportunité peut être interdit à un juge, un jugement de valeur est inévitable, si l’on entend par valeur la «valeur juridique, la conformité au droit. La valeur en question n’est pas une valeur absolue (ce qui est «bien», «bon», avantageux», «préférable» etc.), c’est une valeur juridique et cela est une nécessité», enseignent-ils.

Dans l’arrêt rendu, poursuivent-ils, «il n’y a aucun «jugement de valeur» sur l’État défendeur, on n’a jamais stigmatisé son attitude dans l’absolu, mais seulement par rapport au droit. Il est inexact de dire qu’un jugement de valeur (en général) a été formulé». Se posant, pour finir, des questions sur le règne du droit en Afrique et sur l’acceptation de la contrainte juridique par les gouvernements, Alioune Tine et cie pensent qu’il «ne faut pas inverser les proportions ou déplacer le problème. On peut critiquer les juges, mais pas les menacer. Le rôle de l’état ouest-africain est de renforcer la culture démocratique des États, pas de la réduire à néant»

PR ISMAÏLA MADIOR FALL SUR LE VERDICT DE LA CEDEAO : «le Sénégal doit prendre l’initiative de porter une réforme en vue de sauver la cour»
Pour rappel, dans une longue contribution, publiée dans le quotidien national, Le Soleil, le Pr Ismaëla Madior Fall, Ministre d’Etat auprès du président de la République, avait renvoyé les juges de la CEDEAO à leur copie. «Dans cette affaire du parrainage, la Cour évoque une possible violation des droits de l’Homme, le droit de participation électorale lors des futurs scrutins.

Cet argument est juridiquement dénué de fondement parce que la violation du droit invoqué ne doit pas être incertaine, elle doit être réelle et non pas reposer sur des allégations futures. Ce qui n’est pas le cas», avait-il écrit, non sans inviter le Sénégal à agir. «Les erreurs nous paraissent tellement énormes et susceptibles de porter atteinte à la crédibilité et à la légitimité de la Cour que nous pensons vraiment que le Sénégal doit prendre l’initiative de porter une réforme en vue de sauver la Cour pour qu’elle reste l’organe de protection des droits de l’Homme rêvé par les citoyens de l’Afrique de l’Ouest», a plaidé le Constitutionnaliste, artisan majeur de cette loi, qui a fait beaucoup de bruit lors de la Présidentielle de 2019.

Jean Michel DIATTA

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