2014, le Niger lance en grande pompe un projet innovateur. Il s’agit de la voie Ferrée qui ralliera Niamey à Parakou au Bénin pour une longueur globale de 504 km.
D’un coût de 700 milliards de fCFA, le projet est magistralement mis en œuvre par le groupe Bolloré. 1 ans après, c’est l’inauguration. Les drapeaux et fanions nigériens flottent dans le ciel dégagé d’un Niamey désormais à jours au niveau du transport.
Le président Youssoufou inaugure avec des larmes de fierté et de réussite, non pas sans un discours grandiloquent de recordman, le tronçon fini, fier d’avoir apporté un changement dans le pays de son peuple.
Quelques semaines passent. L’annonce est foudroyante, l’œuvre n’est pas bonne. Le train ne peut pas rouler à régime plein sur ces rails car elles ne sont pas aux normes. Ce sont des rails dangereuses.
Les 2 trains fantaisistes de Bolloré appelés Blue Solutions (je les ai vu) pour faire écolo dans un Niger où le soleil brûle les énergies vitales, resteront plantés dans une gare jamais utilisée: ce sont les rails de la honte.
Elles serpentent dans le pays comme un vestige du néolithique. Impossible de les enlever car, celui qui les a posé demande 8 milliards pour les retirer. C’est du fer et de l’acier et c’est immense et lourd. 8 milliards pour enlever ce pour quoi on a déjà payé des milliards pour les placer sans pouvoir les utiliser? Le Niger refuse de payer cette note d’essuie-table. Le Niger a donc le fer planté dans le cœur de sa ville avec grande douleur. Un décore de modernité vile dans la ville.
2016, une autre Afrique, celle des grands cerveaux, s’engage dans la construction d’un train, tram ou métro urbain. C’est le Sénégal. Les Wolof décrient la mégalomanie de Macky Sall dont il trouve le projet sale dans un pays en manque de caniveaux ou d’électricité!
Le contrat global d’une valeur de 2 milliards d’euros soit 1300 milliards de franc CFA est remporté par le groupe français Angie et Thales. Tout coule, tout va bien. Les marabouts sénégalais ont fait un bon job. Le Sénégal n’est pas le Niger.
Janvier 2919, le paysage du Sénégal change. C’est le premier pays d’Afrique francophone à recevoir des trains high tech, new generation sur son sol, sur des rails sophistiquées qui font pâlir les détracteurs d’un Macky Sall triomphant.
Flanqué d’une squadra politicardos, il fait vrombir les médias de l’écho de ce jour historique. Le voyage inaugural se fait en douceur. Car, même si l’engin a une vitesse de croisière de 165km/h, il ne faut pas raccourcir le plaisir du chef ni le priver d’un bain de foule bordure de route. 54 petites km. Bref!
Les voix chutent. La ville retrouve son calme. Macky reçoit une missive. Le TER ne peut pas rouler. Les rails ne sont pas bonnes. Le projet est mal ficelé et mal exécuté. Mais non, faut le dire autrement au chef par une évidence que le Sénégalais peut accepter: ça consomme trop d’énergie et le Sénégal n’en a pas la capacité. C’est le frottis épineux dans le sexe d’un peuple qui se sent grugé et groggy. Désormais, la poussière de Dakar féconde les trains en ruine inévitable.
2019: Le pays de Alassane Ouattara, pays d’Houphouët l’homme à la basilique, accueille sur sa table, cette initiative faramineuse et historique que seule la Côte d’Ivoire peut bien réussir.
La Côte d’Ivoire, ce n’est pas le Sénégal, encore moins le Niger. L’opposition ne veut pas faire obstacle au développement. On se tait et on regarde.
On y va, on lance le Métro ivoirien des mains solidaires et argentées de Macron himself.
34 km. Une bonne heure à vélo au Tour de France. Mais c’est quand même 34 km sous les tropiques, donc ça fait long. Les Rails locales et la petite infrastructure ferroviaire locale sont vétustes et en capilotade.
Par ailleurs, en Côte-d’Ivoire, il y a du sou. La proforma tombe, 700 milliards de FCFA. Il faut faire comme au Niger. Puis quelques coups de pioche. Ça frappe non pas dans la pierre, mais dans le limon lagunaire.
Sans difficulté. Mais il y a l’eau. Et l’eau, on ne joue pas avec. En plus, on est à Abidjan, capital du Cacao. Macron revois la note, 1000, puis 1140 milliards de FCFA. C’est un consortium français avec à sa tête Bouygues Travaux Publics avec Alstom, Colas Rail et Keolis, quadrature gagnante.
Les ivoiriens parlent trop. Critiquent trop. Difficile de les gruger facilement. Sinon ce sera compliqué pour le made in France. On capitalise sur l’existant. Les chemins déjà tracés par la citarail. Chap chap! Car il faut leur donner du biscuit.
Avril 2021, un publireportage exhibe la parade d’un ministre français tablant sur l’évolution bonne des travaux: un défit costaud mais exhaltant. C’est la Côte d’Ivoire: on va relever ce défit!
Dans cette Afrique, qui cherche à se mettre sur les rails, on ne tire pas les leçons d’une ou deux expériences. On dit que les “critiqueurs” sont des aigris réfractaires au développement. On dit aussi que la Côte d’Ivoire n’est pas les autres. Alors Wait and see…》
Synzi Dadié
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